
Gérard Macé – Poesie (trad. Jean-Charles Vegliante)
Gérard Macé – Poesie
Non scrivo più
Non scrivo più, ma la poesia mi torna a folate, la poesia che sapevamo a memoria e di cui ci si vergogna oggi. Essa somigliava ad aquiloni, a rane, a farfalle, a barchette verniciate male che noi esitavamo a mettere nel bacino grande, tanto avevano l’aria di essere fatte per il naufragio. Essa somigliava come sempre
alla fucina del cielo,
un sole su un’incudine
raffreddata dal mare.
Al fulmine e alla fornicazione,
al letto che hanno bruciato
nella casa di Giove.
Al rullo di tamburo che viene dal cuore
et rallenta
quando frasi alate gli fanno da staffetta.
Al tempo che slitta
sulla banchisa
e si lascia inebriare dalla velocità.
Alla pioggia che fa del cielo
un sacco dove si squarciano le nuvole,
della volta celeste una vescica che si svuota.
Alla cassetta portattrezzi in cima all’Ararat
che doveva servire a riparare il mondo
e che arrugginisce tra le nuvole.
Alla luce che sale
da ventimila leghe sotto i mari.
*
All’aquilone
che confondevo con il volo d’Icaro
mentre suo padre era perso nei suoi calcoli.
Al rumore del tempo: secondo i giorni
il tamburo offuscato del tuono,
la grandine e la carta gualcita.
Ai rospi
che sono dei principi,
ai cavalli che facevano di noi dei re.
All’erba che s’inchina
come un capo penzolante,
al vento che solleva le squame del drago.
Al soffiatore di vetro,
al suo alito solidificato
di cui si fanno poesie.
All’eco della voce,
quando precede
la voce medesima.
Alle conversazioni
nel buio,
quando non si riesce a dormire.
Ai ricordi che si mettono sotto il tappeto,
un tappeto a fiori
dove si mette pure la polvere.
Alla muta di serpe,
memoria e luce
sul ciglio della strada.
Alle recite scolastiche
che annunciavano battaglie
facendo la lista dei vascelli.
Alla realtà
sottile come il ghiaccio,
fragile come il tempo che rimane.
Alle foglie del filodendro
che si avvolgono su se stesse
mentre il lettore volta le pagine.
Ai ricordi di sogni,
alla scrittura segreta
che non so più decifrare.
*
Alla raccolta della nebbia,
alle specie che sopravvivono nel deserto
cibandosi di rugiada.
Alla bolla d’aria che contiene le nubi
e l’odore del tabacco, l’alito dei soldati
e la paura di morire in combattimento.
Al padrone del fulmine
e della parola
che portava il cielo sulle spalle.
Agli strumenti del cercatore d’oro
che spera un tesoro nel fango
come altri un filone nel reale.
All’arco e la lira,
al vaso di Pandora
e la bacchetta di Prospero.
Al riso della iena,
quando il canto del cigno
è troppo dolce ai nostri orecchi.
Al grido del pavone in un cortile di fattoria,
quando mio padre
che si chiamava Léon mi chiama dall’aldilà.
(trad. Jean-Charles Vegliante)
Je n’écris plus
Je n’écris plus, mais la poésie me revient par bouffées, la poésie qu’on savait par cœur et dont on a honte aujourd’hui. Elle ressemblait à des cerfs-volants, à des grenouilles, à des papillons, à des bateaux mal peints que nous hésitions à mettre dans le grand bain, tant ils avaient l’air d’être faits pour le naufrage. Elle ressemblait comme toujours
à la forge du ciel,
un soleil sur une enclume
refroidie par la mer.
A la foudre et la fornication,
au lit qu’on a brûlé
dans la maison de Jupiter.
Au roulement de tambour qui vient du cœur
et ralentit
quand des phrases ailées prennent le relais.
Au temps qui glisse
sur la banquise
et se laisse griser par la vitesse.
A la pluie qui fait du ciel
un sac où crèvent les nuages,
de la voûte céleste une vessie qui se vide.
A la boite à outils au sommet de l’Ararat
qui devait servir à réparer le monde
et qui rouille entre les nuages.
A la lumière qui monte
de vingt mille lieues sous les mers.
*
Au cerf-volant
que je confondais avec le vol d’Icare
pendant que son père était perdu dans ses calculs.
Au bruit du temps : selon les jours
le tambour voilé du tonnerre,
la grêle et le papier froissé.
Aux crapauds
qui sont des princes,
aux chevaux qui faisaient de nous des rois.
A l’herbe qui s’incline
comme une tête qui penche,
au vent qui soulève les écailles du dragon.
Au souffleur de verre,
à son haleine solidifiée
dont on fait des poèmes.
A l’écho de la voix,
quand il précède
la voix elle-même.
Aux conversations
dans le noir,
quand on ne peut pas dormir.
Aux souvenirs qu’on met sous le tapis,
un tapis à fleurs
où l’on met aussi la poussière.
A la mue du serpent,
mémoire et lumière
au bord du chemin.
Aux récitations
qui annonçaient des batailles
en faisant la liste des vaisseaux.
Au réel
aussi mince que la glace,
aussi fragile que le temps qui reste.
Aux feuilles du philodendron
qui s’enroulent sur elles-mêmes
pendant que le lecteur tourne les pages
Aux souvenirs de rêve,
à l’écriture secrète
que je ne sais plus déchiffrer.
*
A la récolte du brouillard,
aux espèces qui survivent dans le désert
en se nourrissant de la rosée.
A la bulle d’air qui contient les nuages
et l’odeur du tabac, l’haleine des soldats
et la peur de mourir au combat.
Au maître de la foudre
et de la parole
qui portait le ciel sur ses épaules.
Aux outils du chercheur d’or
qui espère un trésor dans la boue
comme d’autres un filon dans le réel.
A l’arc et la lyre,
à la boite de Pandore
et la baguette de Prospero.
Au rire de la hyène,
quand le chant du cygne
est trop doux à nos oreilles.
Au cri du paon dans une cour de ferme,
quand mon père
qui s’appelait Léon m’appelle de l’au-delà.